Echange en Macédoine du Nord - Festival Skopje AEJeST 2024
Le Gouren voyage : démonstration et tournoi en Macédoine
La Fédération de gouren a été invitée par la Fédération Internationale de lutte de Macédoine du Nord à participer au Championnat du Monde de Lutte Macédonienne. Cette invitation a été lancée par l'intermédiaire de l'Association Européenne des Jeux et Sports Traditionnels dont est membre notre fédération. Une délégation de cinq lutteurs et une lutteuse s'est donc rendue en Macédoine du Nord pour ce tournoi et en a profité pour présenter le gouren. Voici un petit résumé de leur voyage sportif.
Il s’en est fallu d’un cheveu que cette tournée se fracasse sur l’autel de l’olympisme. En effet, il nous avait échappé que la flamme olympique, divine surprise, traversait Beauvais en ce 18 juillet. Parking annulé, rues barrées : le temps se réduisait comme peau de chagrin avant le départ de l’avion, sans aucune solution pour garer la fière Polo de Tudy. Il a fallu tout l’entregent de Yann, convainquant le patron d’une compagnie de taxis en lui révélant que nous étions une équipe internationale en partance pour un championnat du monde pour que ce dernier nous cède sa place de parking personnel dans sa résidence ! Un chauffeur nous attendait chez lui, pour nous conduire ensuite à l’aéroport où il fallait bien, également, que nous nous trompions de terminal… Si par hasard vous passez par Beauvais, choisissez la compagnie… Qui mérite bien une petite publicité pour ce geste plein d’empathie. Après une attente interminable, dans une cacophonie abracadabrantesque, nous avons enfin pu décoller, direction la Macédoine du Nord.
Une conférence organisée par l'AEJeST
En effet, pour la première fois, plusieurs délégations étrangères étaient invitées par la Fédération internationale de lutte de Macédoine du Nord et leur président Hamid Bakija à la rencontre internationale des luttes traditionnelles organisée à Skopje : la Sardaigne, la Roumanie, la Serbie, la Bulgarie, la Grèce, et la Bretagne. Notre séjour a commencé par un retour forcé sur les bancs de l’école, avec plusieurs conférences sur la notion de transmission des luttes traditionnelles comme héritage culturel à l'Université Internationale des Balkans. Guy Jaouen, président de l’ITSGA (International Traditional Sports and Games Association) et vice-président de AEJeST (Association Européenne de Jeux et Sports Traditionnels) a notamment expliqué à l’auditoire la naissance de la FILC, la Fédération Internationale des Luttes Celtiques, pour tenter d’inspirer la création d’une fédération des luttes des Balkans.
Des démonstrations de différentes luttes
Le lendemain, tous les sportifs ont pris part à une démonstration publique de leur lutte traditionnelle dans le centre de Skopje : S’Istrumpa (lutte de la Sardaigne), Küres (lutte de la Roumanie), Narodno Rvanje (lutte de la Serbie), Pali (lutte de la Grèce) et bien sûr, du gouren (lutte bretonne) ! A la fin de la journée, les règles et usages du Pehlivan, la lutte à l'huile des Balkans, ont rapidement fait l’objet d’une démonstration assurée par deux adolescents. Trop furtif, alors que nous nous attendions à une véritable préparation pour la compétition du lendemain. Etait-ce une mesure d’intimidation ? Le matin du championnat, alors que nous attendions sagement le car, nous avons vu sortir de l’ascenseur un brancard occupé d’un corps inerte recouvert d’un linceul, d’où dépassaient uniquement quelques orteils rigides. On s’est alors dit qu’il fallait qu’on en sorte vivants…
Photos en partie issues du site suivant : https://www.traditionalsports.
Le championnat du monde de Pehlivan
Le championnat du monde de Pehlivan avait lieu au Stadium de Studenicani, village dans les montagnes qui dominent Skopje. Un décor impressionnant nous attendait : des milliers de spectateurs s’installaient sur les flancs de colline, assis sur des couvertures et abrités du soleil de plomb par des parasols et des parapluies. Impressionnante aussi, l’absence de femmes dans l’assemblée, lutteurs compris ; le pehlivan ne leur étant pas accessible, elles doivent se contenter de la lutte libre. Tous les athlètes étrangers ont pris part à cet événement exceptionnel avec le sourire.
Plus de 200 pehlivans de différents pays, répartis en cinq catégories selon l'âge et le poids étaient présents. Enfin, plus ou moins répartis, car l’appariement se fait de manière… disons, inédite : un des responsables décide qui va lutter avec qui, dans le meilleur des cas. En effet, il semblerait que les champions peuvent même choisir leur premier adversaire ! C’est ainsi que Yann a eu un succès notoire, les champions de sa catégorie le convoitant assidûment… Mais avant cela, il nous a fallu enfiler le pantalon typique du pehlivan et réaliser la préparation ancestrale : nous enduire d’huile (vue la crise, l’huile d’olive a été remplacée par de l’huile de tournesol premier prix) de la tête au pied. Une étape exotique et indispensable, pour empêcher l’adversaire de s’agripper. Après qu’on nous ait désigné notre adversaire, une danse rituelle introduit la compétition, au son lancinant de musiciens traditionnels. Même si cette préparation fut plus longue que les combats pour nous, nous avons pu assister à d’autres joutes interminables, de 40 minutes au moins. En 1ère catégorie, un lutteur bulgare a ainsi lutté presque deux heures sous cette chaleur écrasante.
Cette lutte, très physique, suscite des réactions passionnées du public, notamment quand la lutte dérive vers un échange de claques, dans une ambiance tendue. Lors de la finale, nous avons observé comment les spectateurs se rapprochaient progressivement des deux lutteurs avant de faire exploser leur joie lorsque leur champion a fini par terrasser le Bulgare épuisé.
Tout au long de la journée, les vainqueurs et les lutteurs les plus méritants étaient invités à célébrer la danse rituelle du champion au rythme de la percussion du tambour. A la fin, agenouillés face aux musiciens, c’était le moment de la récompense : d’abord recouverts de billets de banque sur un corps enduit d’un mélange d’huile et de sueur, le champion paradait ensuite avec un sous-fifre muni d’un sac plastique, chargé de récupérer les offrandes du public.
Le dernier jour, les gourenerien ont profité d’une journée libre pour aller découvrir le canyon de Matka, avec une petite baignade rafraîchissante à la clé !
Ces déplacements à l’étranger, proposés par la Fédération de gouren, renforcent les identités locales tout en contribuant à une compréhension globale de la diversité culturelle. En effet, les luttes traditionnelles constituent une partie essentielle du patrimoine culturel immatériel des communautés, qui reflète leur histoire, leurs valeurs et leurs connaissances. Nous avons particulièrement apprécié l’accueil chaleureux et la diversité historique et culturelle de ce beau pays.
Elodie Guezennec, Tudy Le Meur, Thomas Gaonac'h, Gwendal Evenou, Yann Pansard.